par Karen Bliss
Robbie Robertson, intronisé au Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens, ancien guitariste et auteur-compositeur principal du groupe The Band, artiste solo à succès, compositeur et producteur de musique à l’image et auteur, est décédé le 9 août dans un hôpital de Los Angeles des suites d’un cancer de la prostate. Il avait eu 80 ans le juillet dernier.
« Robbie était entouré de sa famille au moment de son décès, y compris sa femme, Janet, son ex-femme, Dominique, le compagnon de celle-ci, Nicholas, et ses enfants Alexandra, Sebastian, Delphine, et le compagnon de Delphine, Kenny », peut-on lire dans le communiqué publié par son gérant Jared Levine.
« Il laisse également dans le deuil ses petits-enfants Angelica, Donovan, Dominic, Gabriel et Seraphina. Robbie avait récemment terminé son quatorzième projet de musique de film pour Martin Scorsese, avec qui il collaborait fréquemment, pour le film Killers of the Flower Moon. Au lieu d’envoyer des fleurs, la famille a demandé que des dons soient faits à la bande des Six Nations de la rivière Grand pour soutenir un nouveau Woodland Cultural Centre. »
Robertson a grandi dans la réserve des Six Nations, tout près de Toronto, avant de déménager dans la grande ville où il a commencé à jouer de la guitare à l’âge de 10 ans. C’est à 14 ans qu’il est devenu membre de son premier groupe, Little Caesar and the Consuls, puis Robbie and the Rhythm Chords, qui deviendra Robbie and the Robots. Mais c’est son groupe suivant, The Suedes, qui a attiré l’attention de l’artiste rockabilly Ronnie Hawkins en 1959 et lui a valu le respect et le mentorat de l’artiste même s’il était encore adolescent.
Robertson faisait partie de son équipe de tournée et il a coécrit quelques chansons pour Hawkins. Un an plus tard, à 17 ans, Hawkins a recruté Robertson pour jouer dans son groupe de scène, The Hawks.
Après avoir quitté Hawkins pour poursuivre leur propre carrière, les membres du groupe ont accepté une offre pour accompagner Bob Dylan lors de ses tournées électriques en 1965 et 1966. En 1967, Robertson et ses coéquipiers ont enregistré les « basement tapes » avec Dylan à Woodstock, dans l’État de New York, avant de changer leur nom pour The Band et d’enregistrer l’album phare Music from Big Pink en 1968, suivi de l’album éponyme, tout aussi révolutionnaire, un an plus tard.
Au fil de sept albums studio, Robertson a écrit des classiques tels que « The Weight », « The Night They Drove Old Dixie Down », « Up On Cripple Creek », « Acadian Driftwood » et « It Makes No Difference ».
Le concert d’adieu du groupe au Winterland de San Francisco en 1976 a été filmé par Scorsese et sorti sous le titre The Last Waltz. Ce fut le début d’une amitié et d’une relation de travail de longue date avec le célèbre réalisateur.
Robertson a ensuite composé ou produit la musique des films de Scorsese, Raging Bull, The Color of Money, The Departed, The Wolf of Wall Street, The Irishman et Killers of the Flower Moon dont la sortie est prévue en octobre dans certains cinémas avant d’être offert sur AppleTV+.
Dans un communiqué publié à la suite de son décès, Scorsese a déclaré : « Robbie Robertson était l’un de mes amis les plus proches, une constante dans ma vie et dans mon travail. Je pouvais tout lui confier. Un collaborateur. Un conseiller. J’ai fait de mon mieux pour être la même chose pour lui. Il va sans dire que c’était un géant et que son influence sur la l’art musical a été profonde et durable. On n’a jamais assez de temps avec les gens qu’on aime. Et j’aimais Robbie. »
Après The Band, Robertson a lancé six albums solo, son premier album éponyme paraissant en 1987 et son dernier, Sinematic, sorti en 2019, comprend la chanson « Once Were Brothers », une réflexion sur son passage dans The Band.
Robertson, semble-t-il, était un bourreau de travail qui mettait sa main créative au service de nombreux projets comme des musiques de film et des livres. Il a coécrit l’ouvrage magnifiquement illustré Legends, Icons & Rebels : Music That Changed The World (Tundra Books, 2013) qui présente aux enfants certains des plus grands artistes de tous les temps. En 2015, il a publié l’ouvrage Hiawatha and the Peacemaker. Un an plus tard, il publie son autobiographie, Testimony, qui couvre les trente premières, mais cruciales, années de sa vie, de sa naissance à 1976.
« Je suis l’inspiration partout où elle mène », m’a-t-il dit lors d’une interview pour Billboard en 2019. « J’essaie constamment de me mettre au défi. C’est ça qui garde ton sang en mouvement. Ça me permet de ne pas perdre mon intérêt. Même après tout ce temps, je me lance dans des projets en me disant : “Oh, mon Dieu, comment je vais faire ça? Il faut que je trouve une solution”. C’est comme une toile vierge… Même si tout est lié à la musique, il y a tellement de variables dont il faut tenir compte. C’est un peu stressant, des fois, mais la plupart du temps, ça te donne envie de faire quelque chose de magique. »
En 2019, le documentaire Once Were Brothers : Robbie Robertson and The Band, en partie basé sur Testimony, a été présenté en avant-première au Festival international du film de Toronto (TIFF). Il a été réalisé par Daniel Roher, alors âgé de 26 ans et originaire de Toronto, il comprend des images d’archives et des récits rares, ainsi que des entretiens avec des personnalités comme Bruce Springsteen, Peter Gabriel, David Geffen et le regretté Ronnie Hawkins. Scorsese en était le producteur délégué.
Outre son intronisation au PACC, Robertson a reçu de nombreuses récompenses au cours de sa carrière, notamment le Lifetime Achievement Award des Grammys, ainsi que des prix pour l’ensemble de sa carrière décernés par la National Academy of Songwriters, les Native American Music Awards et le Lifetime Achievement Award du Panthéon de la musique canadienne. Il a remporté plusieurs prix JUNO, a été honoré deux fois par le Canada’s Walk of Fame, a été fait Officier de l’Ordre du Canada et a reçu le Prix du Gouverneur général pour les arts de la scène. Il a également été intronisé au Rock and Roll Hall of Fame en tant que membre de The Band.
« On dit qu’il n’y a jamais trop de récompenses », m’avait-il confié en entrevue avant de recevoir son prix d’excellence pour l’ensemble de sa carrière du Panthéon de la musique canadienne. « Je ressens toujours un sentiment de gratitude lorsque les gens reconnaissent mon travail et ce que j’ai accompli. »
Le premier ministre Justin Trudeau a également exprimé ses condoléances à l’annonce du décès de M. Robertson, le qualifiant de « grande partie des contributions exceptionnelles du Canada dans le domaine des arts. Mes pensées vont à sa famille, à ses amis et à ses admirateurs qui pleurent sa disparition. Merci pour la musique et les souvenirs, Robbie. »
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